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Un 70ème congrès de la FNO sous le signe de l’Europe

Réunis à Libramont, en Belgique, pour le 70ème congrès de la Fédération nationale ovine du 26 au 28 avril, les producteurs ovins français et wallons ont réaffirmé leur attachement à l’Europe

La place de la production ovine française dans l’Europe et à l’international était au coeur d’une table ronde organisée par la FNO.
La place de la production ovine française dans l’Europe et à l’international était au coeur d’une table ronde organisée par la FNO.
© HLP

«C’est un congrès singulier», a conclu Michèle Boudouin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO), le 28 avril. Pour ses 70 ans, l’organisation a en effet choisi la Belgique pour marquer son attachement à l’Europe, en cette année où le Traité de Rome fête quant à lui ses 60 ans. Au-delà du contexte électoral français, qui a reposé plus fortement que jamais la question de l’appartenance à l’Union européenne, ce sont surtout les conséquences du Brexit qui inquiètent les producteurs ovins. «Le Royaume-Uni est un partenaire important des échanges de la production ovine», a rappelé Michel Barnier dans une vidéo. L’ancien ministre de l’Agriculture, nommé négociateur en chef du Brexit par la Commission européenne, se veut attentif à la viande ovine, particulièrement sensible dans les négociations commerciales. Le Royaume-Uni en exporte 80 000 tonnes, soit 30 % des exportations totales de l’UE, et la France constitue son premier acheteur.
«Nous avons besoin de ces importations car nous ne sommes pas autosuffisants, elles sont nécessaires pour répondre à la demande des Français et maintenir un niveau de consommation suffisant», explique Brigitte Singla, éleveuse de brebis dans l’Hérault. Une préoccupation qui s’ajoute à la concurrence déloyale liée à la dévaluation de la livre sterling, et aux incertitudes sur le devenir du contingent néo-zélandais après le départ du Royaume-Uni. 

Opportunité pour l’UE
Malgré les inquiétudes qu’il suscite, le Brexit peut aussi être vu comme l’occasion de reconstruire l’Europe sur des bases nouvelles. Pour Marc Tarabella, eurodéputé belge, c’est une opportunité d’aller plus loin que le seul «grand marché» voulu par des Britanniques opposés à une construction socialement et fiscalement plus homogène.
Eric Andrieu, eurodéputé français, voit également dans le départ des Anglais l’occasion d’un «réflexe vital» pour l’UE, permettant «de relancer la dynamique européenne, par une Europe à plusieurs vitesses». Ce qui permettrait également de redonner du sens à la PAC, dont le maintien du budget est aussi menacé par le Brexit. Car, souligne John Bryan, président de l’IFA (l’association des agriculteurs irlandais), «le budget de la PAC va diminuer alors que les normes sont de plus en plus strictes». «On demande trop aux agriculteurs», poursuit-il, alors que les négociations commerciales avec les États-Unis, le Canada, le Mercosur, se font «avec des pays qui, grâce à des programmes nationaux, sont beaucoup plus forts que l’UE».
«On dit que vous coûtez trop cher, mais c’est totalement faux !», s’emporte de son côté Sabine Laruelle, ancienne ministre fédérale des PME et de l’Agriculture de Wallonie. Seulement 2 % du budget de l’Europe si on prend en considération les budgets nationaux : «pour une alimentation de qualité, en quantité et à un prix raisonnable, ce n’est pas cher», insiste-t-elle. Il faut en revanche arrêter de réformer la PAC pour satisfaire l’opinion publique. «Arrêtons de tomber dans le populisme de bon aloi, la PAC est là avant tout pour avoir une agriculture ancrée sur les territoires», ajoute Sabine Laruelle. Raison pour laquelle Marc Tarabella propose de saisir «cette opportunité de développer la filière de manière plus intense, dans nos territoires». S’il cite aussi l’exemple de l’alimentation animale, dont 70 % est importée de pays aux normes moins strictes que les normes européennes, le conseil est encore plus valable pour la filière ovine, qui n’est autosuffisante ni en France, ni en Belgique où «la marge de progression de marché est de 900 %», a expliqué Jean Devillers, président de la Fédération interprofessionnelle caprine et ovine wallone (Ficow). Cependant, pour faire progresser un secteur en manque de reconnaissance comme de revenus, «nous avons besoin de la PAC» dont «les soutiens [aux producteurs] sont légitimes», rappelle avec force Michèle Boudouin. Une PAC qui, de l’avis des participants à la table-ronde, ne doit plus être réformée tous les cinq ans pour donner plus de visibilité aux producteurs et faciliter le renouvellement des générations. La présidente de la FNO insiste sur la nécessité d’obtenir des prix rémunérateurs pour maintenir les atouts d’une «filière de qualité» : entretien des territoires, maintien de l’emploi dans les espaces ruraux, économie durable… Des préoccupations qui dépassent les frontières et justifient d’autant plus ce besoin d’Europe. «Le collectif est un atout : comme nos animaux, fions nous à notre instinct grégaire pour avancer ensemble », a ainsi conclu la présidente de la FNO, persuadée que « l’Europe sera la solution pour notre élevage ovin ».

Trois Questions à Michèle Boudoin, présidente de la FNO

« Notre horizon c’est l’Europe, notre étendard l’unité ! »

Le congrès de la FNO s’est ouvert dans un contexte singulier à plusieurs titres…
Pour notre soixante-dixième congrès, nous avons en effet fait le choix de la Belgique, capitale de l’Europe. Ce n’est pas un hasard, à l’heure où nous célébrons soixante années de construction européenne, même si force est de constater qu’avec la volonté des Britanniques de sortir de l’Union, cet anniversaire a forcément un goût amer. Pour autant, il serait éminemment dangereux de céder aux sirènes de la résignation et de la colère imaginant que parce que l’Europe traverse une crise, il faut la renverser. Ce n’est pas parce qu’une maison a besoin de travaux qu’il faut la démolir. Méfions-nous des positions trop radicales pour être honnêtes. Unis dans l’adversité, nous devons construire une Europe meilleure plus en phase avec les fondamentaux du Traité de Rome. Des prix rémunérateurs, de la performance technique, des soutiens renforcés voilà le triptyque indispensable aux éleveurs pour dégager un revenu. Cela passe par l’Europe, la contractualisation, la formation, l’accompagnement technique…

Quelles sont les conséquences du Brexit pour la production ovine ?
La sortie du Royaume-Uni de l’UE constitue un enjeu majeur pour la production française et européenne car cela risque de rebattre les cartes de la politique commerciale de l’Union. La répercussion au plan budgétaire comme au plan des échanges va être sans précédent. Secouée de l’intérieur, l’Europe mène toutefois une politique ambitieuse de commerce extérieur : CETA, accord d’association UE/Ukraine, projet UE/Japon, et réouverture des discussions avec l’Océanie. Un dernier volet qui concerne particulièrement la filière ovine. Nous avons alerté l’ensemble des députés français et la Commission sur ce sujet sensible qui pourrait à terme conduire à une augmentation sensible d’agneaux néozélandais sur le marché européen.

Application « désastreuse » de la PAC 2015, réforme en cours des ICHN « catastrophique ». La FNO est particulièrement remontée contre le ministère de l’agriculture. Qu’attend-t-elle de la PAC post 2020 ?
Des objectifs clairs, au premier rang desquels : le maintien des aides couplées orientant la profession vers la performance technique tout en simplifiant et assouplissant les normes et les règles qui étouffent tous les efforts de professionnalisation ; et un accès privilégié aux aides du second pilier par la prise en compte des contributions positives de notre élevage ovin sur la biodiversité, les écosystèmes et l’entretien des paysages.

Propos Recueillis par S.Chatenet

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