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Alimentation animale
Marchés : une accalmie sur un plateau élevé

Le premier semestre 2022 a vu les cours des céréales et la protéine atteindre des niveaux historiques. Une flambée du coût alimentaire doublée d'un manque de fourrage qui nécessite des solutions individualisées. Analyse avec Jean-Luc Doneys.

Jean-Luc Doneys met en avant la réactivité et l’agilité pour répondre à des besoins au cas pas cas.
Jean-Luc Doneys met en avant la réactivité et l’agilité pour répondre à des besoins au cas pas cas.
© © DR

On a coutume de parler de volatilité du marché des matières premières agricoles, de montagnes russes. Depuis le début de l'année, c'est plutôt l'ascension de l'Everest sans oxygène qu'ont subie les éleveurs. Qu'en est-il en cette fin d'été ?
Jean-Luc Doneys, directeur de la division agriculture du groupe Altitude : « Effectivement avec la crise en Ukraine, il y a eu une explosion des coûts ces six derniers mois, une hausse généralisée sur les céréales comme sur toute la partie protéique (tourteaux...), mais avec des oscillations et des moments de fièvre plus ou moins forte sur les marchés. On a atteint un point haut en mai avec 430 € la tonne de céréales, c'est resté à un niveau très élevé fin juin avant une phase d'atterrissage au fur et à mesure que la récolte européenne arrivait. Aujourd'hui, on pourrait parler d'une période d'accalmie, en particulier en raison du plafonnement des cours des céréales dans une zone autour de 320 €/t mais on reste à un seuil élevé, bien supérieur aux 250 €/t de début février. Cet atterrissage résulte de récoltes finalement bonnes dans le monde, en particulier en Russie où elles ont été exceptionnelles, et aussi, dans une moindre mesure, à l'ouverture de la mer Noire même si on se demande chaque jour quel pourcentage est exporté. De la même manière, le prix de la protéine a un peu reculé. Au final, la tonne d'aliments composés vaut entre 80 et 100 euros de plus qu'en début d'année. Et malgré la stabilisation évoquée, on sent que les marchés restent très très nerveux. Dans 15 jours, on peut à nouveau voir le cours de la protéine s'envoler. »

Avec quel impact concret pour les éleveurs en termes de coût alimentaire ?
« L'impact est plus ou moins important selon le poids de l'alimentation dans la production : le plus impacté reste l'aliment pour volailles, la production porcine l'est aussi, les élevages bovins lait un peu moins et les systèmes bovins viande encore moins. Et cet impact a pu être – du moins partiellement - absorbé par l'évolution des cours. Mais est venu s'ajouter un autre élément du paysage : le manque de fourrage lié à la sécheresse. Un déficit important mais lui aussi variable. La situation de chaque exploitant est donc un cas particulier, notamment au regard des stocks de report de 2021 dont il disposait et de ses assolements, selon qu'ils soient plus ou moins sécurisants. Si on prend le maïs par exemple, par endroit c'est catastrophique, à d'autre ça reste honorable. Ce qui est sûr c'est qu'il manque du fourrage. »

Lors des précédents épisodes de forte sécheresse, des aliments de substitution ont été développés, à base de produits déshydratés, cette offre est-elle disponible cette année ?
«La première chose que les éleveurs doivent faire, c'est se poser et faire avec leur technicien, qu'il soit de Centraliment ou de la Chambre d'agriculture, un bilan précis de leurs ressources fourragères et de ce dont ils ont besoin vraiment. Il ne s'agit pas d'acheter n'importe quoi à n'importe quel prix d'autant que les disponibilités des solutions classiques de substitution des fourrages ne sont pas là cet automne, qu'il s'agisse de la luzerne déshydratée sous forme de foin ou granulés ou de la pulpe de betterave. Cette pénurie est liée à la fois à une faible récolte et au fait que dans leur chaîne de production, le moment clé est celui du séchage, très énergivore. En Europe, dans les deux principaux pays fournisseurs que sont la France et l'Espagne, on ne trouve rien. Outre la sécheresse de 2022, l'Espagne a investi ces dernières années d'autres marchés en Asie, avec des pays comme la Chine fortement demandeurs de foin de luzerne. »

Dans ces conditions, vers quels autres produits les éleveurs peuvent-ils se tourner pour compenser le manque de fourrage ?
« Encore une fois le message est d'aller chercher ce dont l'éleveur a vraiment besoin. On sait que ce qui va plutôt manquer dans les rations cet hiver, c'est de l'énergie et de la fibre, pas tellement de protéine. Par conséquent, il faut se tourner vers du foin, de l'ensilage de maïs, de l'ensilage de maïs épi quand on en trouve, plutôt qu'acheter coûte que coûte de la luzerne (riche en protéine) ou de la pulpe de betterave dont l'apport cellulosique peut être fourni par d'autres matières premières. »

Comment voyez-vous évoluer le marché dans les prochaines semaines et mois ?
« Ce sont des marchés qui restent compliqués, sur lesquels on n'a pas forcément de visibilité avec beaucoup de phénomènes parasites et moins de possibilité de tamponner avec des contrats à terme, mais le pire n'est pas forcément à craindre. Ça peut aussi se calmer gentiment. De toutes façons, à un moment, ça se calmera. Le viseur est plutôt à l'horizon de l'été 2023 selon le volume des nouvelles récoltes de céréales avec parallèlement la question de la fluidité du commerce. Notre message c'est qu'il faut s'accrocher, certes le contexte est difficile, avec des mouvements qu'on n'a jamais vécus mais nos équipes sont là pour aider les éleveurs à trouver des solutions. C'est aussi le rôle d'un fabricant d'aliment d'être réactif, innovant, agile. »
 

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