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« L’élevage bovin doit bénéficier d’un soutien différencié »

Pierre Chevalier, président de la FNB (Fédération nationale bovine), estime que l’élevage bovin viande doit bénéficier d’une réorientation des soutiens de la Pac, pour corriger la faiblesse des revenus des éleveurs. IL lance : "l’urgence est de restaurer l’équilibre économique des exploitations et de redonner des perspectives aux éleveurs"

Pierre Chevalier président de la FNB (Fédération nationale bovine).
Pierre Chevalier président de la FNB (Fédération nationale bovine).
© F.d’Alteroche/Réussir

La Fédération nationale bovine tient son Assemblée générale les 4 et 5 février à Cherbourg. Dans quel contexte se trouve aujourd’hui l’élevage bovin viande ?
Pierre Chevalier : L’élevage bovin viande subit une crise sans précédent qui remet en cause la pérennité de ce secteur. Les revenus des éleveurs spécialisés se sont effondrés de 32 % l’an passé, après une chute de 25 % en 2007. Ils se situent en 2008 au plus bas de l’échelle des revenus agricoles avec 10 600 € par actif et par an. Ils n’atteignent seulement que 45 % de la moyenne nationale estimée à 23 600 €. En cause, la flambée des charges et la pression sur les prix à cause de la fièvre catarrhale ovine et l’érosion de la consommation.
Les éleveurs ne sont plus en mesure de faire face aux remboursements de leurs investissements de modernisation et de mise aux normes pour améliorer la compétitivité et répondre aux attentes des consommateurs et de la société. Face à une telle situation, l’urgence est de restaurer l’équilibre économique des exploitations et de redonner des perspectives aux éleveurs.

La mise en œuvre du bilan de santé de la PAC est-elle en mesure de redonner des perspectives aux éleveurs ?
PC : Le ministre de l’Agriculture est revenu de Bruxelles avec une boîte à outils, bref tout un matériel susceptible de prendre en compte les spécificités de l’agriculture française. A la veille d’arbitrages décisifs sur la Pac, la FNB s’oppose à une logique de strict nivellement des soutiens à l’hectare qui induit un abandon de toute politique d’orientation des productions en livrant l’agriculture au seul jeu du marché. Nous revendiquons une politique de soutien différenciée, notamment en direction de l’élevage, ainsi que le compromis européen du 20 novembre en fournit l’opportunité.

Rétablir l’équité

Vous êtes donc opposé à la convergence des aides proposée par les céréaliers….
PC : Effectivement, nous ne voulons pas d’une stricte convergence des DPU. Cela n’apporte rien au rééquilibrage des aides en faveur du secteur fourrager. Notre objectif est de parvenir à un soutien économique renforcé aux exploitations d’élevage dans le cadre du premier pilier au travers de l’ensemble des surfaces herbagères et fourragères sur tout le territoire. Pour rétablir la compétitivité et l’équité du revenu, nous estimons que nous pouvons mobiliser à ce titre l’ensemble des crédits résultant du découplage des 25 % Scop. Dans cette perspective, une part des aides à l’élevage (PMTVA, PAB gros bovin) pourrait participer à ce soutien des surfaces fourragères dans la limite de 25 % du montant de ces aides. L’objectif est d’arriver à un soutien supplémentaire pour l’élevage bovin de 200 euros/ha par rapport à la situation actuelle. Les 75 % restant de la prime à la vache allaitante resteraient couplés sur l’ensemble du territoire. La PMTVA est en effet déterminante pour le maintien de la production dans les zones difficiles. La Commission européenne l’a admis en proposant le maintien de cette aide spécifique, y compris au-delà de 2013. Et une étude récente de l’Inra va dans le même sens.
Quant à la PHAE, elle resterait inscrite dans une logique agri-environnementale. Son cofinancement à 75 % par des crédits communautaires permettrait de l’élargir à de nouveaux enjeux (biodiversité…)

Avez-vous l’appui des organisations professionnelles agricoles et de l’administration sur ces propositions ?
PC : Nous avons transmis le dossier au ministère de l’Agriculture, à l’Elysée, à Matignon et à Bercy. Je suis convaincu pour ma part qu’on ne pourra maintenir à l’avenir des budgets agricoles que si la société y adhère. Comment pourrait-on expliquer qu’un secteur risque de disparaître faute de soutien, alors que d’autres secteurs qui ont des revenus plus élevés seraient mieux aidés ?
Si un rééquilibrage des aides n’est pas opéré, on risque de perdre deux millions de vaches allaitantes sur un troupeau de quatre millions. La conséquence, c’est un recours massif à des importations en provenance d’Amérique du Sud avec des viandes qui ne sont pas soumises aux mêmes contraintes sanitaires et environnementales que les nôtres. Ce qui n’est pas acceptable ni pour les éleveurs, ni pour les consommateurs.

Risque de déprise

Y-a-t-il aujourd’hui des signes de déprise de la production de viande bovine ?
PC : Je le crains. Les abatteurs et les industriels redoutent de manquer de matière première. Ils sont plus disposés qu’ils ne l’étaient à mettre en place une politique contractuelle. Une idée que nous défendons depuis longtemps qui permettrait de sécuriser l’approvisionnement de l’aval et les prix aux producteurs.
Ce qui n’est pas contraire au rééquilibrage des aides. En effet, le prix des céréales est inscrit à la hausse sur le long terme. Si cette remontée est durable, les prairies dans les zones intermédiaires vont disparaître et l’élevage avec. Le scénario du mouton se profile, avec une hypothèse à ne pas exclure, qu’on risque de ne pas trouver de la viande sur le marché mondial. On le voit aujourd’hui, les grands pays producteurs de viande comme l’Argentine abandonnent l’élevage quand les cultures deviennent plus attractives.

Redoutez-vous une reprise des négociations de l’OMC ?
PC : Pascal Lamy a tenté une relance des négociations fin 2008. Sans succès. Je suis presque rassuré de l’arrivée de Barack Obama qui me paraît plus protectionniste que George Bush.
Si on appliquait à la viande bovine la proposition qui était sur la table d’une réduction de 70 % des droits de douane, l’élevage bovin viande serait balayé et nous devrions importer 30 à 40 % de nos besoins. Autrement dit, nous perdrions notre indépendance alimentaire.

La crise de la FCO est-elle derrière nous ?
PC : Il s’agit d’un dossier passionnel qui continue d’exaspérer les éleveurs sur le terrain et dans lequel il faut mettre du rationnel et plus de lisibilité.  Par exemple, nous demandons que les éleveurs puissent vacciner eux-mêmes leurs animaux comme ils le font souvent par ailleurs. Ce qui permettrait de limiter les surcoûts de frais vétérinaires.
Ceci étant, on ne fera pas l’économie d’un fonds de gestion de crise sanitaire y compris en y associant les éleveurs. Le bilan de santé le permet. Face aux crises sanitaires récurrentes et de plus en plus fréquentes (ESB, fièvre aphteuse, aujourd’hui FCO) les éleveurs doivent bénéficier d’un système de protection adapté à l’importance des enjeux.

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